J'ai deux patries : la Tunisie et la langue française

J'ai deux patries : la Tunisie et la langue française
Chroniques

Comment se porte la langue française aujourd'hui ? Quel est son statut ? Comment la défendre et la promouvoir ?



J'ai deux patries : la Tunisie et la langue française. Cela ne m'empêche pas de parler d'autres langues ou aimer d'autres pays. Et puis, mon appartenance n'est pas ausi duelle qu'elle pourrait le paraître.

La Tunisie parle français depuis fort longtemps et s'il le fallait, notre histoire nous apprend que nous avons parlé le latin avant la France.

Ainsi, il fut un temps antique où nous avons été proto-francophones et aujourd'hui, même en recul, la langue française continue à être présente, pratiquée et diffuse. Ce lien lointain avec le latin est d'ailleurs l'une des multiples racines de ma francophonie.

Ce qui aujourd'hui a changé, c'est que le français n'est plus une langue véhiculaire lorsque deux Tunisiens conversent entre eux.

D'autre part, les départs des communautés minoritaires à partir du milieu des années cinquante, a entraîné une lente érosion de l'usage du français comme lingua franca entre les différentes familles culturelles tunisiennes.

Cette Tunisie plurielle parlait le français mais l'uniformisation du tissu social, l'explosion urbaine et les réformes de l'enseignement ont fini par avoir raison de ce melting pot.

Aujourd'hui, la langue française est la cible d'un ressentiment anti-français, fabriqué de toutes pièces par les officines islamistes et panarabistes.

Paradoxalement, la perte de la langue française par les classes populaires ne s'accompagne pas d'un recours à une autre langue. Elle est l'un des symptômes de la débâcle de l'école et du décrochage scolaire.

Par ailleurs, l'enseignement de la langue française subit un recul manifeste concrétisé par la faiblesse des enseignants du primaire qui trop souvent, n'ont ni les moyens techniques ni les capacités linguistiques de transmettre les fondamentaux de la langue de Molière aux enfants.

Nous parlons bien de l'école publique où le français est devenu une patate chaude que les établissements scolaires se passent en la mutilant à chaque étage.

Dans le privé, c'est tout à fait autre chose. L'enseignement du français est d'un bon niveau mais il n'est pas abordable pour tous. Cet état de fait a instauré une langue de classe, accessible pour les uns, illusoire pour tous les autres.

Ces embryons de réflexion mériteraient d'être approfondis et quelques pistes de recherche-action pourraient aisément être defrichées. Seulement dans le paysage actuel, qui pourrait engager ce chantier ? Le recours aux experts ressemble à un miroir aux alouettes tant ils sont désimpliqués, intellectuellement prévisibles et absents des terrains de la novation.

Nombreux sont ceux qui vivent de cette rente, ce filon inépuisable qui épouse les méandres du serpent de mer que les politiques nomment "Francophonie multilatérale".

Je sais la vanité de mes propos, l'écrasement de ceux qui, comme moi, défendent la francophonie, par ceux-là même qui ne la défendent pas mais s'en nourrissent insatiablement.

Je vais me taire. Seulement pour aujourd'hui. Car, je reviendrai à la charge pour débusquer faussaires et imposteurs. Je reviendrai pour défendre cette langue française - ma deuxième patrie disais-je - qui a besoin d'être extirpée de la gangue munichoise qui s'accommode déjà de sa disparition annoncée.

Pour conclure, profitons de ce billet pour saluer les efforts remarquables de l'Institut français, du réseau des Alliances françaises et ceux tout aussi éloquents de nombreux enseignants véritablement militants dont le grain fécond interpelle les ivraies conniventes et défaitistes.



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